samedi 25 novembre 2017

Galipettes

Ils profitaient de la musique suave et puissante, c’était le chaos dans la chambre, le sol devint le mur, le mur devint le sol, les meubles des participants et même les peluches étaient de mèche. Soudain, le pire vint à surgir, papa et maman se tenaient dans l’encadrement de la porte, désir et envie s’envolèrent et partirent immédiatement. Ma copine tenta de se cacher, couchée sous une table dans un coin, je levai les yeux, je m’aperçus que les leurs étaient rouge sang.

Dans la poche

À Montmartre, la jeune Amélie, assise devant sa glace se trouvait laide, tout en jalousant la beauté de la butte à travers ses carreaux fêtes, n’osant même plus regarder son portrait photo qui avait le don de la mettre dans un état de déprime puissant et corrosif. Elle choisit donc de se faire un café, non par envie plutôt par dépit, et c’est quand elle arriva dans sa cuisine qu’elle le vit. Cet homme debout, souriant et ténébreux à la fois, lui posa une question qu’elle n’entendit pas tellement elle sentait son corps entier battre la chamade. Ce n’est qu’une fois revenue sur la terre ferme qu’elle entendit ceci « chère demoiselle, me feriez-vous l’honneur et la joie de me donner votre accord ? Elle ne chercha même pas à savoir de quoi il s’agissait, c’était dans la poche.

Le Camion Peine

Il y a trois cent quarante-huit ans, six mois et dix-neuf jours que les parisiens s’éveillèrent au bruit de l’énorme et insatiable « camion–peine », effectuant le même trajet méticuleusement, passant en revue chaque fenêtre, chaque porche, chaque porte d’entrée, à l’aide de son bras de cuivre coiffé d’une pupille lumineuse avide de trouver et d’aspirer la moindre émotion de bonheur, de joie, de bien-être ou même de tristesse qu’il pourrait croiser…

Faisant feu de tout bois le « camion-peine » n’hésite pas à vider de sa consistance émotionnelle tout être vivant, chats, pigeons, rats afin d’assurer qu’aucun être doué de vie ne puisse penser, construire et réfléchir, tout cela dans le but d’éviter toute rébellion, tout plan de survie et de sauvegarde. L’extraction est rapide, un grand flash précis comme un laser, tuant dans l’œuf tout amorce d’espoir.

Les Mamans

Il y a trois cent quarante-huit ans, six mois et dix-neuf jours que les parisiens s’éveillèrent au bruit, l’avancée des mamans. Au début c’était un grand grondement et peu à peu du bruit, puis des cris, des chants. Un groupe bien formé comme une armée chantait aussi très coloré. Ni uniforme, ni d’unité : robe, jupe, châle, cheveux longs ou courts : toutes différentes. Chacune autour cherchait à comprendre ce mouvement, ce chahut. On était au cœur de Paris devant l’hôtel de ville. Alors le mouvement a stoppé, une maman s’est avancée devant les grandes fenêtres du bâtiment. Elle dit « dans 348 ans et six mois, vous verrez, nous n’accepterons plus ce harcèlement permanent. »

Souvenirs d'enfant

Bringuebalant au rythme de la musique, il était dans un état mystique qui le replongeait dans ses souvenirs d’enfant quand il flânait au milieu des pruniers, seul celui de gauche avait des feuilles brillantes qui se balançaient sous l’effet du vent. Elles scintillaient de milles feux face au soleil couchant. Il grimpait comme un cabri d’arbres en arbres, il voulait encore une fois les impressionner.

Il règne une atmosphère particulière

Il règne une atmosphère particulière dans ce lieu si fantasque et on y voit des éclats de lumière, quelques arbres bruissant, qui s’éveillent vers demain. L’horizon semble triste dans ce grand univers, mais ce n’est pas encore la fin. Et quelques âmes errantes sont des badauds éveillés, ils sortent à la recherche d’amateurs de soleil, qui pourraient leur donner un plus, une méga poche.

Amélie Artiste Peintre

Il y a trois cent quarante-huit ans, six mois et dix-neuf jours que les parisiens s’éveillèrent au bruit, qui s’invite et anime les rues du quartier Montmartre. Amélie était une artiste peintre, elle aimait faire des portraits, elle avait le don de faire ressortir ce qu’il y avait de plus beau chez toutes les personnes qu’elle peignait. Un jour alors qu’elle s’installait, elle vit un jeune homme s’approcher d’elle, il était grand beau ténébreux, elle sentit immédiatement son cœur battre la chamade, d’un ton joyeux le jeune homme dit « pouvez-vous faire mon portrait jeune demoiselle ? ». Amélie ne sut que répondre, elle fit un large sourire comme pour lui donner son accord. Ils parlèrent ensuite pendant des heures en oubliant le temps qui passe.

Paris mystique

Il y a trois cent quarante-huit ans, six mois et dix-neuf jours que les parisiens s’éveillèrent au bruit de pigeons sauvages, qu’un mauvais temps hasardeux, d’une violente bourrasque, avait jeté sur les contreforts de Notre-Dame de Paris. Les bêtes volantes et offensives quoique roucoulantes affolèrent la population mystique d’alors, qui prit peur aussi, croyant une vengeance divine bien biblique dans son genre, à l’encontre de l’habitude de manger des poules au pot que les citadins du quartier latin avaient prises depuis l’invitation royale de feu Henri IV, qui goutait également d’un autre genre de poules. (Extrait « un mégalo dans la métropole » de Lorant Deutsch).

Bonhomme Engin

L’individu mi homme mi machine est un bonhomme engin qui virevolte dans le spectacle de rue, qui est la manigance d’une ville. Le sujet sans parole ni alcool mène une vie d’huile sur les mares plates et intentions robotiques. Malgré les forêts confuses de déracinement, le ciment sémantique et guerrières antiques, les folles Amazones qui ronronnent dans le sang et les flammes, dans les alentours des rivières dépravées. Le mystère héréditaire est loin de plaire et de dévoiler son aventure excitante aux yeux des foules paresseuses, celles-ci ont su être violentes, ses réactions fortes, face au drame de la vie reçue, quelle pitoyable ardoise. Manque une claque dans sa face, un flash dans ses lunettes.

La colère d'Alexandra

Elle est partie, passant par le garage. Ne pas être vue. Dans la rue, elle court. Son cartable dans son dos bouge. Alexandra entend un grondement, elle s’enfuit, le train qui longe la route n’est qu’un petit bruit dans sa tête. Dans sa tête ça ne va pas. Elle est trop colère, alors elle court. La rue est vague dans ses yeux, des yeux entourés sont unités. Elle garde ses larmes et elle court, rien ne la gêne, ni son anorak, ni son châle qui ramène ses longs cheveux qui dansent. Elle s’enfuit, sans un cri dans une dédale de rues. Bientôt midi dit la lumière dans le chahut de la ville. Elle court vers son papa, un papa qu’elle croit voir et son cœur bat alors la chamade. Mais ce n’est qu’une ombre, un piéton qui disparaît. Elle tourne autour de la grande place, sans se lasser, les grandes fenêtres du bâtiment officiel sont fermées, cet hôtel de ville sinistre. Elle passe avec des pensées tristes, la préfecture sa mauvaise mine sur elle, les harcèlements du monde les démontent. Son papa n’est plus qu’une image dans sa poche.

Sophie Calle

À Montmartre, j’ai toujours aimé passer des heures assises devant la sortie du funiculaire à observer les touristes grabataires, incapable de monter les marches. J’avais 14 ans et je tenais un cahier répertoriant les types d’individus : en surcharge pondérale, en fauteuil roulant, en béquilles, en pleine forme mais allant se faire un café dès leur arrivée, paresseux par essence. Je les regardais tous avec avidité jusqu’à ce qu’elle arrive, elle, la grande demoiselle au chapeau fleuri, élégante, debout, souriant et digne. C’était bien la première fois que je vis un tel personnage, venu d’une autre époque. C’était bien la première fois que je quittais mon promontoire pour suivre ce halo lumineux, cette femme charismatique, qui subissait railleries et regards réprobateurs sans jamais sourciller. Mais c’est pourtant la plus belle chose que je vis sur terre.

Androïde Femelle à Lunettes

Pour mener à bien toute étude chromosomique du monde insatiable qui nous entoure, commençons par passer méticuleusement en revue le sujet qui nous intéresse présentement, soit l’androïde femelle à lunettes. Il est à observer son bras de cuivre articulé, sa brune pupille dilatée et avide d’images, ses orifices nasales pour respirer l’air et simuler un va-et-vient régulier du diaphragme, signe de vie. Si on prend du recul et que nous considérons l’individu mi-homme mi-machine dans son ensemble, il apparaît tout bois dehors comme ceux du cerf commun qu’on trouvait dans les grandes forêts continentales. Ces bois disposent de capteurs, faisant guise d’antennes réceptives douées de sensibilité à la douleur, à la chaleur, au froid, à l’humidité, ses réactions fortes de rebellions en étant la preuve. L’objet est doté d’autres atours réactifs à la stimulation. Un simple pincement de la mamelle génère un flash dans ses lunettes et une excitation pubienne. Nous avons cessé toute amorce supplémentaire, s’agissant de rester en vie et de se mettre l’androïde dans la poche.

L'invasion des chats

Il y a 348 ans, six mois et 19 jours que les parisiens s’éveillèrent au bruit assourdissant des miaulements de chat. La ville tout entière était envahie par des centaines de milliers de chats. Les habitants comptaient les jours et enduraient le supplice infligé par ces félins sauvages qui retournaient les poubelles, qui se précipitaient dans les maisons pour investir les lits, fauteuils et multiples coussins de la ménagère. Les ravages s’amplifiaient avec les amoncellements de crottes qui jonchaient les rues, les cages d’escalier, les coins de couloir. Ces crottes qui ne se désagrégeaient pas. Sans compter les effluves pestilentiels de leurs urines qui piquaient les yeux et grattaient le nez. Et c’est face à ce constat que Romuald, grand personnage aux yeux clairs, aux larges narines et à la peau rongée par les morsures de puces de ces affreux envahisseurs, devisait devant une assemblée armée jusqu’aux dents, prête à faire feu. Deux stratégies :
·      > éliminer l’animal

·      > éliminer la source du pullulement : les personnes âgées et leurs écuelles de nourriture

Un serpentin

Ce matin, à côté de Sonia, avec son cartable dans le dos, bouge un serpentin et il lui tire, une fois, deux fois, comme pour l’emboucaner. Le bus roule, celui qui longe les routes, le long du littoral, des minutes très longues ! Mal de tête ! Oui, dans sa tête, tout se bouscule, ce jeune lui parle, moquerie, colère, alors, elle court en sortant, il la suit, en lui touchant l’épaule et lui dit « tu veux bien venir avec moi ». Elle s’était fait un film, un stress et lui, ce gamin, il voulait juste flirter. Dans ses yeux, les larmes pour rien, elle court, plutôt fait de grands pas, honteuse, sa jupe plissée se coince, elle trébuche, il la rattrape pour qu’elle ne tombe pas, et ils dansent.

Bataclan

Ils étaient tous au Bataclan, ce 11 septembre. L’ambiance était là, ils profitaient de la musique et tout à coup, la Ville de Paris pleure ! C’est le chaos… tout se noircit comme si le ciel tombe, les jours comme cela, des supplices, des cris, des mots d’horreur, et du sang, des larmes, tout est perdu. Les rues, les voitures, les maisons sont plongées dans ce marasme, des tirs, des bruits, des hurlements, le pire vient de surgir, horreurs, tueries, amoncellements, des corps sont tombés… des oiseaux en cage s’envolent très loin, tout devient glauque. Couchée sous la table, j’ouvre enfin les yeux, mais juste à mi-clos, toute la pièce est couleur sang, les tirs ont leurs fins, elles crient, des yeux sans vie, des mots cinglants, des cris, des vitres explosées ! Un grand personnage se tient contre un mur, incapable d’agir, de marcher, sa peau moite et salie, des éclats de sang des autres, ils sont terrifiés, ils les voient les secours, les pompiers, le SMUR, et l’armée juste là devant lui, ils donnent tous les premiers secours, prennent les blessés pour hôpital, les ambulances commencent le défilé, emmène ces pauvres gens ! Percutés, détruits, loin de leurs sources, ils pleurent tous, les mains dans leurs poches.

L'église de Montmartre

Ce matin, des sons de la nouvelle chapelle retentissent. L’église de Montmartre ancrée dans ce paysage urbain, devant quelques arbres bruissant, avance quelque part, monte les grands escaliers, là où la lumière du jour pointe le reflet d’un petit matin qui s’éveille, des nuages glissent, le ciel bleu posé dans ce seul ensemble, vieilles pierres, une grande montée d’escaliers, celle qui amène tous ces gens, les badauds, mais aussi les touristes fortunés, les amateurs du soleil levant, les artistes, aussi cette grand-mère née dans cet arrondissement, à contempler, à rêver… Une simple lumière, un reflet du soleil, tout cela devient merveilles en plein centre de notre méga capitale, la belle Paris ! Elle flâne, et part, l’immensité de la ville, les lumières au loin, les couleurs mordorées, les roses, ouvre son imaginaire, évasion au Kenya, panthères, lions, éléphants. Elle est avec des jumelles dans sa jeep, vêtue de sa saharienne kaki, les cheveux serrés autour d’un élastique noir, elle observe là, loin de tout, elle touche la liberté.